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Honduras : visages et voix de la répression Convertir en PDF Version imprimable Suggérer par mail
06-08-2009

À travers des médias alternatifs, il est possible de récupérer des déclarations qui montrent la férocité du régime. Elles ont été prononcées par des personnalités connues au Honduras et, cependant, elles n'ont pas leur place dans les grands médias de ce pays.

Policiers attrapent la présidente de l'Université Autonome du Honduras, Julieta Castellanos

 

"Ils m'ont dit : ça te fait mal, chien ? Crie, chien!" "Dans un cachot de neuf mètres carrés il y avait plus de trente compagnons, complètement endoloris par les coups reçus." "Nous marchions sur la route, et là nous avons pris une déviation pour éviter un barrage et ils ont commencé à tirer." "Ils l'ont tué et ils ne nous permettent même pas de le veiller en paix." "Dans l'histoire du Honduras on n'a jamais vu à la police réprimer publiquement de cette façon."

La majorité de ces déclarations ont été prononcées par des personnalités connues au Honduras et, cependant, elles n'ont pas été reprises dans les grands médias honduriens, associés aux entrepreneurs et aux partis traditionnels qui ont impulsé ce coup d'Etat. Pour savoir ce que les réprimés disent, il faut chercher ailleurs : des sites d'information alternative, des blogs, des organismes de défense des droits de l'Homme. C'est le moyen pour se rendre compte de la férocité du régime dont Roberto Micheletti a prit la tête.

Le premier des témoignages fait parti d'une série reprise dans www.defensoresenlinea.com, des manifestants arrêtés et réprimés le jeudi 30, le jour où le professeur Roger Vallejos a été tué. La violence policière a monté en intensité dans les occupations de routes à Tegucigalpa et Comayagua. "Quand nous étions allongés sur le sol, la bouche en bas, ils ont commencés à nous insulter : ils le frappaient ceux qui levaient à moitié la tête - a raconté le maître Francis Alvarez-. Si quelqu'un se retournait pour regarder, ils lui donnaient des coups de bottes dans le visage. Ils disaient aux femmes que c'était des chiennes qui devraient être à la maison pour s'occuper de leurs maris et avec leurs matraques ils leur touchaient les parties intimes. Ils nous disaient qu'ils commandaient et que s'ils nous revoyaient dans les rues ils allaient tous nous tuer." Le dirigeant Juan Barahona s'est communiqué depuis la prison avec la Radio Liberada : " Nous sommes 75 et avons été arrêtés dans le quartier Bethléem, à Tegucigalpa : la majorité avons été frappés, blessés, avec avec des hématomes à la tête et aux yeux, avec des marques de coups de bâton dans le dos. La police nous traite comme des animaux". Au dirigeant Carlos Reyes, a-t-il précisé, ils lui ont fracturé un bras et l'ont emmené à l'hôpital.

Roger Vallejos a agonisé 36 heures : une balle dans la tête au milieu d'une manifestation réprimée sur le Marché du Mayoreo. La famille a dénoncé qu'elle a été fustigée quand il a été interné - ils l'ont délogé de l'hôpital - et aussi durant la veillée funèbre. "Ils l'ont tué et nous ne pouvons même pas le veiller en paix - a dit  Salomón, son frère, à Radio Globo-. Qu'ils cessent de nous envoyer la police pour nous agresser." "Vous avez peur ?", lui a-t-il été demandé. "Bien sûr, qui ne va pas l'avoir, quand tu vois passer une patrouille avec les fusils pointés sur toi Nous voulons veiller Roger en tranquillité, parce qu'il n'est pas juste qu'ils viennent menacer et provoquer. C'est un fait lâche." Il y avait des raisons pour avoir peur : dimanche à l'aube un autre enseignant, Martin Rivera a été assassiné. Il était allé voir Vallejo et il est apparu, comme Pedro Magdiel Muñoz à El Paraiso, avec des dizaines de coups de poignard. La police a informé qu'elle a arrêté un adolescent, mais Bertha Oliva, de Cofadeh, assure qu'il s'agit d'un mode opératoire des escadrons de la mort dans les années 80. "Ils ont commencé par des meurtres de militants de base à coups de couteau pour les faire passer comme des actes de la délinquance commune", a-t-elle déclaré lors de l'inhumation." Nous savons que la fureur avec laquelle ils les ont tués est un message pour que le reste de la population s'effraie", a-t-elle dit. Lundi, l'armée a assassiné un autre paysan dans un barrage militaire.

Le syndicaliste Eliseo Hernández a publié sur www.honduraslaboral.org un récit de la répression sur la route interaméricaine. "À une heure de l'après-midi est arrivé un contingent d'environ 400 militaires et  200 policiers qui nous ont prit en embuscade ; ils nous ont immédiatement lancé des grenades lacrymogènes, ont commencé à nous frapper à coups de toletazos et à nous tirer dessus avec l'idée de nous tuer, raison pour laquel nous n'avions comme seule alternative de fuir par les montagnes. Je me demande : s'ils nous avaient déjà délogés de manière brutale et sauvage, pourquoi nous poursuivre durant plusieurs kilomètres jusqu'à capturer beaucoup de compagnons et compagnes, et déjà au le sol, complètement sans défense et impuissants, les frapper, les insulter et les torturer pour ensuite menoter de manière brutale et humiliante ?". Hernández a rendu compte des prisonniers entassés dans une cellule : "La police leur jetait des capsules qui, au contact de l'humidité du sol, émanaient une forte odeur de gaz moutarde, ce qui se convertissait en cruelle torture, puisque l'asphyxie était presque totale". L'épisode a aussi été raconté par par Bertha Oliva.

Le vétéran leader indigène Salvador Zúñiga a raconté sur le site nicaraguayen www.tortillaconsal.com les souffrances du groupe de 300 manifestants qui se sont rendus de Tegucigalpa à la frontière pour se réunir avec Zelaya. "Il y a une guerre contre un peuple désarmé qui ne fait que réclamer que soit réinstallé le président pour qui nous avons voté pour qu'il gouverne quatre ans", a-t-il affirmé. "Ils en sont arrivés à emprisonner 300 personnes par jour, a-t-il dit. A El Paraiso, ils ne tenaient plus dans le commisariat et étaient emmenés au stade." À la sortie de la capitale, ils leur ont retiré les bus et ils ont continué à pied; après avoir éludé plusieurs barrages ils ont du prendre le large dans la montagne, parce qu'ils ont commencé à tirer sur eux. En arrivant aux villages, ils étaient dénoncés et ils devaient continuer de fuir. L'armée les a encerclés près de la frontière, les a arrêtés, les a frappés et ensuite, entassés, elle les a envoyés dans des fourgons à Tegucigalpa et San Pedro Sula. Seulement 40 ont réussi à passer au Nicaragua. "Les gens ont peur : c'est une situation difficile, a-t-il expliqué. Quand les personnes vont aux manifestations, elles sont actives. Mais elles sont seules, elles entrent en situation de panique."

Sur le site Honduras résiste (resistenciamorazan.blogspot.com), un des plus actifs dans la diffusion de dénonciations, est reproduit une interview que Radio Progreso a faite au père Faust Milla, un militant des droits de l'Homme qui travaille avec les indigènes, qui a été arrêté par les escadrons de la mort dans les années 80 et qui aujourd'hui est à l'abri. "J'ai vécu ces situations pendant douze ans, j'attendait la mort à n'importe quel moment, a-t-il évoqué. Il y a quelques jours ils sont venus me chercher à la radio dans laquelle je travaille, subrepticement. Je n'ai pas peur mais je fais attention. Bien que je ne sache pas combien j'endurerai enfermé, parce que je ne peux pas continuer de voir courir le sang. Je crois que dans l'histoire du Honduras une telle répression n'a jamais été vue, de manière si publique, autant à la vue de tous." Milla considère que si cette situation continue, "l'indignation du peuple va déborder, probablement de manière désordonnée". "Parce qu'il est impossible de continuer d'endurer cela - fait-il remarquer. Parfois ils ne donnent mëme pas d'eau aux blessés dans la prison. Violer les droits de l'homme fondamentaux pour ces groupes est un métier. Pour cela, ils le prennent avec naturel et peu leur importe que le monde entier les appellent criminels et bêtes. Mais le peuple s'est levé, s'est indigné, et a décidé maintenant de continuer de lutter pour la liberté pacifiquement, jusqu'où arrive la limite."

"Le secteur putschiste ne s'attendait pas à ce que les gens perdent la peur et soient préparés à dire les noms et prénoms de ceux qui sont derrière ce projet déshonorant de harcèlement, de persécution et de mort", a signalé Oliva, en assurant que la Cofadeh a comptabilisé 2702 arrestations illégales, une grande quantité de menaces directes de mort et neuf meurtres, "certains commis par des militaires habillés de civils". "Les putschistes sont peu nombreux, mais, il gèrent beaucoup d'argent et les médias sont de à eux - a signalé Milla-. Ils empoisonnent les gens et les remplissent de haine."

 

Angel Berlanga, Pagina/12, 06 aoüt 2009.

http://www.pagina12.com.ar/diario/elmundo/4-129477-2009-08-06.html

Traduit par http://amerikenlutte.free.fr

 

 
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