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De la corruption au Venezuela Convertir en PDF Version imprimable Suggérer par mail
13-10-2007
Aucun Vénézuélien ne niera le problème : la corruption est un véritable fléau dans le pays. Même le premier d’entre eux, le président Chavez, la dénonce régulièrement dans ses discours. Toutefois, ce problème réel est utilisé par nombre d’opposants de ladite révolution bolivarienne pour démontrer la faillite du « régime » et affirmer que la situation s’aggrave. Beaucoup se basent sur les chiffres fournis par le Corruption Perception Index (CPI, Indice de perception de la corruption) de l’organisation Transparency International qui présente le Venezuela comme l’un des pays les plus corrompus au monde. En effet, cette organisation a classé le pays au 138e rang (sur 163) en 2006 et au 162e (sur 179) en 2007.
Il ne s’agit pas ici de nier le problème mais d’examiner de plus près ces informations et montrer que le CPI est un indice extrêmement peu fiable de la corruption.
Nous publions donc à l’occasion de la publication du CPI 2007 de Transparency International des extraits d’un article que Gregory Wilpert a publié fin 2006 dans la revue Extra ! de l’organisation états-unienne de critique des médias FAIR.
 
par Gregory Wilpert

 

Accuser les politiciens de corruption est probablement l’un des meilleurs moyens de discréditer les hommes politiques en Amérique latine. Chavez lui-même arriva au pouvoir en accusant la classe politique toute entière de corruption, ce qui le rendit très populaire auprès de nombreux électeurs, épuisés de voir leur pays s’enfoncer dans la pauvreté, malgré son énorme richesse pétrolière nationale. Il ne devrait donc y avoir rien d’étonnant à ce que les opposants de Chavez, vénézuéliens ou étrangers, profèrent les mêmes accusations, après huit ans passé au pouvoir.

Un article récent du Newsweek (« A question of Graft », 31 juillet 2006) affirmait, par exemple, que Chavez a « aggravé cette même corruption endémique qui discrédita complètement les deux principaux partis politiques dans les années 1990 ». L’article donnait ensuite quelques-uns des cas de corruption les plus emblématiques et cite le l’Indice de perception de la corruption de Transparency International (TI), qui classe le Venezuela parmi les pays les plus corrompu au monde. Allant dans le même sens, un article du Washington Times (« New Role for a Sore Loser », 15 sept. 2006) affirmait qu’il y a « une corruption galopante dans le cercle intime des ministres et conseillers de M. Chavez ». De tels propos sont assez fréquents dans les principaux médias à propos du Venezuela. En effet, d’après TI, le Venezuela est un des pays les plus corrompus au monde, puisqu’il se classe à la 130e place sur un total de 158, entouré du Burundi, du Cambodge, du Congo, de la Georgie, et du Kirghizistan, loin derrière les pays d’Amérique latine. Entre 2001 et 2005, le Venezuela est passé d’un score de 2,8 à 2,3 sur une échelle de 1 à 10, 10 marquant l’absence de corruption. Toutefois, un examen plus minutieux de ces statistiques qui font apparemment autorité, montre une image quelque peu différente de la corruption au Venezuela.

Premièrement, l’indice de corruption de TI se base sur les perceptions de la corruption dans un pays donné par des experts et des hommes d’affaires, pour la plupart étrangers ou non résidents.
Etant donné que l’image du Venezuela est en grande partie façonnée par les médias internationaux et nationaux, qui sympathisent dans leur toute grande majorité avec l’opposition et qui accusent continuellement le gouvernement Chavez de corruption, il n’est pas surprenant que l’Indice de perception de la corruption reflète ce point de vue. Pire, cela devient un cercle vicieux où chaque rapport sur l’augmentation du sentiment de corruption augmente ce sentiment de corruption.

Deuxièmement, il existe au moins deux méthodes d’évaluation de la corruption beaucoup plus objectives, auxquelles les médias internationaux ne font jamais référence et qui montrent que le Venezuela n’est pas moins bien classé que les autres pays d’Amérique latine. Le première méthode est, elle aussi, utilisée par Transparency International et est connue sous le nom de Global Corruption Barometer (GCB, Baromètre de corruption globale). La seconde, c’est le Latinobarometer (LB, Baromètre latino) . Le GCB et le LB réalisent tous deux, avec impartialité, des sondages similaires parmi les ressortissants des pays en question.

Par exemple, quand TI a interrogé les Vénézueliens pour savoir si la corruption affecte largement, modérément, légèrement, ou aucunement leur vie, ils ont répondu que cela les affectait largement ou modérément 55% du temps, ce qui est comparable aux réponses données en Colombie (54%), au Costa Rica (56%) et en Equateur (57%) avec, plus loin derrière, les Boliviens (73%) et les Mexicains (67%). De la même façon, quand le LB a demandé aux Vénézuéliens d’estimer le pourcentage de fonctionnaires corrompus, la réponse était inférieure de trois points à la moyenne continentale, 65% au Venezuela contre 68% en Amérique latine.

Toutefois, la manière dont un pays perçoit son propre niveau de corruption peut être influencée par des opinions existantes dans chaque pays, où ses citoyens peuvent sous-estimer ou surestimer de manière infondée cette corruption en se basant purement sur des idiosyncrasies nationales. D’autres questions telles que les progrès dans la lutte contre la corruption pourraient peut-être fournir des éléments de comparaison plus objectifs.

Dans ce cas, le sondage LB montre que le Venezuela arrive en 3e position pour le pourcentage de ses citoyens déclarant qu’il y a eu des progrès dans la lutte contre la corruption ces deux dernières années (42%). Seuls la Colombie et l’Uruguay ont un meilleur score (45%). Le sondage TI obtient des résultats totalement différents avec 72% des Vénézueliens déclarant que la corruption a « beaucoup » ou « un peu » augmenté ces trois dernières années. Ce pourcentage est comparable à ceux de la Bolivie (70%), du Costa Rica (79%), de l’Equateur (81%), et des Etats-Unis (65%).

La méthode peut-être la plus objective d’évaluation de la corruption dans un pays est celle où les personnes interrogées ont personnellement vécu un cas de corruption durant la dernière année. D’après le Latinobarometro, seuls 16% des Vénézueliens ont déclaré avoir personnellement eu connaissance ou participé à un acte de corruption au cours des 12 derniers mois. Ce pourcentage est inférieur de 4 points à la moyenne latino-américaine (20%) et de 11 points par rapport aux chiffres de 2001 au Venezuela (27%). En posant une question similaire (« Ces 12 derniers mois, avez-vous ou un membre de votre famille, soudoyé quelqu’un de n’importe quelle forme que ce soit ?  »), TI obtient une réponse affirmative de seulement 6% des sondés, le même pourcentage que la Colombie et loin derrière la Bolivie (20%), l’Equateur (18%) et le Mexique (31%).

En somme, quand on compare des données plus objectives sur la corruption au Venezuela avec celles d’autres pays latino-américains, la corruption y est aussi importante que dans d’autres pays, voire légèrement inférieure. Les accusations des gros titres de la presse sur la « corruption galopante » au Venezuela sous Chavez, insinuant qu’il y a une différence notable par rapport aux gouvernements antérieurs ou aux autres gouvernements de la région, ne résistent pas à l’analyse.


RISAL - Réseau d'information et de solidarité avec l'Amérique latine
URL: http://risal.collectifs.net/

 

Source : Venezuelanalysis.com (http://www.venezuelanalysis.com/), 27 septembre 2007.

Traduction : Hélène Benghalem.

Introduction rédigée par la rédaction du RISAL.

 
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