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Mexique: à deux ans de la bataille d'Atenco Convertir en PDF Version imprimable Suggérer par mail
07-05-2008

Le 2 mai 2006, les autorités locales de la municipalité de Texcoco (Etat de Mexico) accordent l'autorisation aux fleuristes de disposer leurs stands au sein du marché municipal. Parmi eux, il y a des habitants de la localité voisine de San Salvador Atenco qui sont sortis vainqueurs d'une longue et dure lutte sociale contre le gouvernement fédéral. En effet, en 2001 les habitants d'Atenco se sont organisés pour défendre leurs terres et empêcher la construction du nouvel aéroport international de la capitale. A l'issue de plusieurs mois de mouvement et de résistance, ils ont obtenu gain de cause, perdant tout de même un compagnon assassiné par les forces de police. C'est de cette mobilisation que naît le Front communal en défense de la terre, le FPDT, qui rejoindra l'Autre Campagne zapatiste.

Le 3 mai, le gouvernement local rompt unilatéralement cet accord et permet à la Police fédérale préventive (force d'élite militarisée) et à la police de l'Etat d'entrer dans la commune pour déloger les fleuristes. Les militants du FPDT tentent d'empêcher cette assaut et il s'ensuit une journée de violences, au cours de laquelle les habitants parviennent à repousser partiellement les forces de police.

Le 4 mai, les gouvernements de l'Etat et fédéral planifient une opération de police d'ampleur pour "ramener l'ordre et la tranquillité à Atenco". Ce sont 3 500 policiers qui organisent la répression de cette résistance communale. Ce jour-là, les forces de l'ordre s'opposant à quelques centaines de personnes seulement armées de pierres vont se livrer aux pires exactions contre la population dans son ensemble. Grâce aux divers documents qui ont été publiés suite aux violences, et aux témoignages des habitants, on constate l'existence d'effractions dans des habitations privées et de mises à sac, une violence inouïe sur les personnes rencontrées par la police, des tortures, des violences sexuelles sur les femmes, des détentions arbitraires et deux assassinats, un jeune de quatorze ans qui a reçu une balle d'un policier à bout portant et un étudiant qui mourra de ses blessures à l'hôpital. On réalise que les détenus ont été abusés et torturés pendant leur transfert au centre pénitentiaire. Comme l'indique l'article de journal qui suit, l'impunité prévaut toujours depuis les événements de répression et de violation des droits de l'homme.

Il est à noter que les médias de masse (tels que la chaîne Televisa) ont largement cherché à provoquer le soutien du reste de la population à cette opération policière par une information biaisée et partiale. Ils ont mis l'accent sur les violences commises par les insurgés contre les policiers et ont diminué l'ampleur de la répression quand ils ne l'ont pas ouvertement appuyé. A ce titre, on peut voir le documentaire réalisé pour faire le clair sur ces événements et notamment le traitement médiatique :
"Atenco : Romper el Cerco", vraisemblablement disponible en téléchargement sur Internet (peut-être même en français). Pour comprendre la situation à Atenco, les documentaires "Tierras si Aviones no" et "la Révolte des machettes" existent en version française.

Ce qui suit est un article paru dans "La Jornada" (quotidien mexicain) pour la célébration du second anniversaire des faits. Dimanche dernier à Atenco, les membres du FPDT (organisation tellement importante localement aujourd'hui que ses décisions s'imposent en général à celles du pouvoir local officiel) ont repris les machettes, symbole de leur résistance et outil essentiel des paysans, et ont organisé une marche de leur commune à celle de Texcoco, puis une autre devant les instances suprêmes de la justice à la capitale. Ils ont réitéré leur engagement de lutte sociale et demandé la libération de leurs prisonniers politiques. Ici, à San Cristobal, Chiapas, avait lieu le même jour un rassemblement des membres de l'Autre Campagne et de groupes étudiants pour revendiquer la libération de tous les prisonniers politiques du pays, pas seulement des zapatistes incarcérés, avec exposition de photos et projection de documentaires sur les prisonniers politiques.


Les responsables intellectuels et matériels, impunis
L'IMPUNITÉ MARQUE LE DEUXIÈME ANNIVERSAIRE DE LA RÉPRESSION CONTRE LE FPDT

Emir Olivares Alonso

A deux ans de la violation des droits de l'homme à San Salvador Atenco (3 et 4 mai 2006) par des policiers, "la constante a été l'impunité", puisque jusqu'à aujourd'hui les victimes, les leaders du mouvement, les organisations civiles et les avocats des détenus s'accordent pour dire que les responsables matériels et intellectuels des agressions n'ont pas été punis "de manière convaincante".

Le solde de ces événements est : les morts de Francisco Cortés Santiago, quatorze ans, après avoir reçu une balle de calibre 38 utilisée par les forces de l'ordre, et d'Alexis Benhumea, étudiant blessé à la tête par une cartouche de gaz lacrymogène de la Police fédéral préventive, et qui a passé plus d'un mois à l'hôpital avant d'y mourir le 7 juin 2006.

On compte aussi, du côté de la Commission nationale des droits de l'homme, des dizaines de torturés et au moins 26 femmes violées et abusées sexuellement - sur les 47 détenues - ainsi que 207 arrestations, dont 5 étrangers qui ont été expulsés du pays.

En plus, Ignacio del Valle - leader du Front communal en défense de la terre (FPDT) -, Felipe Alvarez et Hector Galindo sont incarcérés au centre de haute sécurité Altiplano et on les a condamnés il y a an à 67 ans de prison pour le délit de séquestration lors des faits de février et avril 2006, et le jugement pour les événements de mai est encore à venir.

Juan de Dios Hernández, défenseur de la majorité des détenus et membre du Collectif d'avocats zapatistes, a signalé une autre irrégularité dans le fait que des dizaines de personnes ont été privées "illégalement de leur liberté", puisque tous ceux qui sont sortis libres, à l'exception d'Alfonso Martínez - en liberté conditionnelle et qui est toujours sous le coup d'une inculpation pour attaque aux voies de communication - ont été récemment graciés suite à plusieurs recours.

De plus, plusieurs personnes vivent une sorte d'exil, parce qu'il existe des ordres d'appréhension contre elles. Leonel Rivero, avocat du FPDT, a indiqué que le cas d'Adán Espinoza, Bernardino Cruz et Jorge Flores, accusés de séquestration, vol et privation de liberté, qui attendent toujours l'acceptation de leur recours afin d'éviter leur détention. De même que pour América del Valle, la fille du leader du FPDT, la situation n'est pas favorable car les recours légaux se sont épuisés pour éviter son appréhension étant donné qu'on lui a nié la possibilité d'un recours et la révision de son cas.

Trinidad Ramírez, l'épouse de del Valle, qui a assumé le leadership du FDPT, a assuré que "les agressions et tortures contre les compañeros et la violence sexuelle sur les femmes sont toujours impunies". Il a indiqué que sa lutte continuera "jusqu'à obtenir la liberté de tous les compañeros et la justice".

Parallèlement, elle signale que ceux qui ont perpétré les abus et "tortures", délit considéré de lèse-humanité par les organismes internationaux, n'ont pas été sanctionnés.

La justice de l'Etat de Mexico a entamé un processus pénal seulement contre 21 policiers - sur les 2 000 qui ont participé à l'opération - pour des délits mineurs ; 15 ont déjà été exonérés, dont 5 inculpés pour abus d'autorité et qui sont en liberté conditionnelle. Et vendredi dernier, l'agent Doroteo Blas Marcelo a été condamné à trois ans et deux mois de prison pour actes libidineux. Néanmoins, et étant donné que cela n'est pas considéré comme un délit grave, il a obtenu sa libération contre une caution de 8 427 pesos [soit approximativement 560 euros, NdT].

Traduit de "La Jornada" du dimanche 4 mai 2008 par Lucha Libre.

 
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