Menu Content/Inhalt
Accueil arrow Divers arrow Argentine : six dirigeants paraguayens prisonniers en grève de la faim
Argentine : six dirigeants paraguayens prisonniers en grève de la faim Convertir en PDF Version imprimable Suggérer par mail
29-08-2008

Les paysans sont en prison depuis 2006 et exigent que l’Exécutif leur accorde l’asile politique. Lors d’un procès douteux au Paraguay, ils ont été accusés de l’assassinat de Cecilia Cuba, fille de l’ancien président du Paraguay, Raul Cubas Grau. Ils ont le soutien des organismes de défense des droits de l’Homme.

Gustavo Lezcano Espínola

Cela fait onze jours qu’ils ont arrêté d’ingérer des aliments. Ce sont six paysans et dirigeants politiques paraguayens qui sont prisonniers à Marcos Paz depuis mai 2006, accusés, faussement d’après eux, de l’homicide de Cecilia Cubas. Après une « parodie de procès » dans leur pays, ils sont arrivés à Buenos Aires, car on leur avait assuré qu’ils y obtiendraient l’asile politique. Mais 72 heures après l’avoir demandé, ils ont été arrêtés et la Justice Fédérale a déterminé qu’ils devaient être extradés. Le même jour que Fernando Lugo a pris ses fonctions à la présidence, ils ont commencé une grève de la faim pour réclamer que le Pouvoir Exécutif les reconnaisse en tant que réfugiés. Lors du dernier entretien qu’ont eu leurs avocats au ministère de l’Intérieur – d’après ce qu’ils ont exprimé –,  on leur a dit qu’on ne trouvait pas le dossier, qu’on allait les appeler lorsque celui-ci apparaitra.

Agustín Acosta González, Basiliano Cardozo Giménez, Siméon Bordón Salinas, Gustavo Lezcano Espínola, Roque Rodríguez Torales et Arístides Vera Silguero ont été accusés au Paraguay de la séquestration et l’assassinat de la fille de l’ancien président de ce pays, Raul Cubas Grau, en septembre 2004. L’accusation repose sur les déclarations d’un témoin qui aurait été corrompu et qui aurait des connexions avec la mafia, comme l’a affirmé à Página/12 l’une des avocats des prisonniers paraguayens, Liliana Mazea. Ce témoin a affirmé que Patria Libre, le parti auquel appartiennent certains des détenus, avait des liens avec les FARC et il a parlé d’une réunion où ils auraient décidé le sort de Cubas.

La Justice de première instance paraguayenne a refusé à plusieurs reprises les demandes de poursuites à leur encontre et a refusé de les incarcérer. Pour le ministère public, l’accusation était une « omission d’avis d’un fait punissable », ce qui veut dire à peu près de ne pas avoir dénoncé ce qu’ils auraient entendu lors de cette réunion. « Il a ensuite été vérifié que Cecilia Cubas était morte déjà avant la date donnée par le témoin, et vu que l’accusation ne tenait plus debout dans cette parodie de procès, ils ont changé la date de la morte de la jeune fille, voilà pourquoi nous soutenons qu’au Paraguay ils n’ont aucune garantie d’un procès impartial », a signalé Mazea. Ce journal lui a également demandé pourquoi ils soutiennent que leurs vies courent un risque s’ils sont extradés. « Dans les prisions paraguayennes, les sicaires tuent les prisonniers sur commande et il y a des antécédents d’autres dirigeants de Patria Libre sur lesquels ils ont voulu rejeter des séquestrations», a répondu l’avocate.

Face à la grave situation dans laquelle ils se sont retrouvés, les six accusés ont visité plusieurs ambassades à Assomption. Devant la délégation argentine, ils ont expliqué la persécution dont ils souffrent avec d’autres organisations paysannes, ils ont raconté les morts de leurs compagnons et l’ambassadeur Rafael Roma leur a assuré qu’à Buenos Aires on leur donnerait l’asile politique. Ils l’ont cru et s’y sont rendus, mais lorsqu’ils faisaient les démarches devant le Comité d’Eligibilité pour Réfugiés (Cepare), la Cour d’appel au Paraguay a changé l’accusation et a ordonné la détention provisoire, en ignorant les décisions du juge d’instruction Pedro Mayor Mercado. Trois d’entre eux se trouvaient dans les bureaux du Cepare lorsqu’ils ont été arrêtés par Interpol. Deux autres ont été détenus à Florencio Varela, et le dernier, près de son lieu de travail, avec une opération comprenant hélicoptères et la présence de « Crónica TV ». Informée de la demande de refuge, la plaignante, mère de Cecilia Cubas avait obtenu la rapide réaction des pouvoirs politiques et judiciaires des deux pays. Trois jours après, ils ont été notifiés au centre pénitencier de Devoto que le Cepare leur avait refusé la demande de refuge, en invoquant que le Paraguay est un pays démocratique, régi par l’Etat de droit.

Durant le procès d’extradition, la Fondation d’Investigation et Défense Légale Argentine (FIDELA) a présenté de nombreuses preuves au juge fédéral Ariel Lijo, parmi lesquelles le témoignage de Martin Almada, militant reconnu pour les droits de l’homme, qui a affirmé  qu’au Paraguay, l’organisation Patria Libre est poursuivie et que les détenus étaient « les boucs émissaires de la justice paraguayenne ». Mais le magistrat ne les a pas considérés comme des persécutés politiques et a résolu de procéder à l’extradition. Mais même après avoir fait appel devant la Cour Suprême, ils n’ont pas obtenu de réponse affirmative. Le plus haut tribunal leur a répondu qu’il n’allait pas se prononcer sur la question de fond jusqu'à ce que le Pouvoir Exécutif ait résout s’il leur accordait le statut de réfugiés. Une fois de plus, l’offensive de l’épouse de Cubas, soutenue par le lobby de Juan Carlos Blumberg, avait prospéré. Même si le secrétariat des Droits de l’Homme s’est prononcé en faveur des Paraguayens, le ministère de l’Intérieur ne décide toujours pas, car – d’après eux – ils ne trouvent pas les dossiers.

Après deux ans et trois mois, les prisonniers paraguayens sont fatigués d’attendre. Ils croient que Lugo pourrait demander à l’Argentine de leur accorder le refuge, sans que cela signifie pour autant une accusation contre son propre pays. Bien que le nouveau gouvernement est très différent de celui du Parti Colorado, ils considèrent que les structures judiciaires, policières et pénitentiaires et que les « mafias contre ceux qui luttent » ne se reconvertissent pas d’un jour à l’autre. Précisément, à l’heure actuelle, l’Etat paraguayen est inculpé devant la CIDH-OEA pour le cas de séquestration et tortures des dirigeants de Patria Libre actuellement réfugiés au Brésil.   « Si aujourd’hui les compagnons sont extradés au Paraguay, cela signifie virtuellement une condamnation à mort, c’est pourquoi ils ont pris cette mesure extrême», souligne le communiqué de soutien auquel ont adhéré des centaines d’organisations et de personnalités, parmi lesquelles Hebe de Bonafini, Adolfo Pérez Esquivel, Osvaldo Bayer, Daniel Viglietti, Eduardo Galeano, Victoria Donda, Miguel Bonasso, Martin Almada, Ligue Argentine pour les Droits de l’Homme, FIDELA, Union de Paysans Poriajhú, Coordination pour la liberté des prisonniers politiques, Commission de DDHH paraguayen en Argentine, Mouvement de victimes de la dictature de Stroessner, Ceprodh, Parti Communiste, Pañuelos en Rebeldía, entre autres….

 

Persécution politique et idéologique

« Nous sommes prisonniers en raison d’une persécution politique et idéologique, parce qu’au Paraguay, les libertés publiques continuent coupées depuis l’époque de Stroessner, l’Etat a été dirigé par le Parti Colorado pendant plus de 60 ans et l’ambassade yankee a joué un rôle fondamental, par exemple, la loi anticommuniste et l’installation d’une base militaire », exprime le dirigeant de Patria Libre Agustín Acosta, dans une vidéo enregistrée à la prison de Marcos Paz, chargée sur le site www.noalaextradicion.blogspot.com . « Notre détention et le démembrement de notre organisation, sous prétexte que nous voulons installer une guérilla, sont ce dont les Etats-Unis ont besoin pour renforcer leur présence dans la région. Nous avons quitté le pays à cause des graves accusations pour tel fait que nous n’avons pas commis. » Lorsqu’ils étaient détenus depuis un an, ils ont envoyé une lettre à l’écrivain Osvaldo Bayer où ils disaient : « Nous sommes prisonniers pour dénoncer notre réalité, pour être libres, pour éduquer les humbles, nous sommes prisonniers parce que nous sommes le peuple, nous sommes la voix des sans voix, nous sommes prisonniers parce que nous sommes cohérents avec notre discours, nous sommes des patriotes et nous pensons à des jours meilleurs pour les prochaines générations. »

Adriana Meyer, Página/12, 25 août 2008

http://www.pagina12.com.ar/diario/elpais/1-110346-2008-08-25.html

Traduit par eli

http://amerikenlutte.free.fr/

 
< Précédent   Suivant >

Soutien !

Si vous voulez collaborer au site en proposant des traductions ou soutenir financèrement ce projet 100 % indépendant, merci de nous contacter !