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Argentine : paysans du Mocase se mobilisent contre des persécutions Convertir en PDF Version imprimable Suggérer par mail
01-10-2008

"Les grands entrepreneurs veulent nous virer"

Des paysans du département de Copo, dans la province de Santiago del Estero, ont dénoncé que la police, aux ordres du juge Anselmo Juarez, est entrée dans leurs maisons, les a frappés et leur a tout volé. Aujourd'hui, environ trois cents paysans se rassembleront dans la capitale provinciale.

"Quarante policiers sont venus où je vis, avec le juge, plus d'autres inconnus : ils ont attrapé un de mes enfants, ils l'ont frappé, lui ont mis les menottes, ont demandé à ma fille de neuf ans où je me trouvais ; là ils les ont frappé et ensuite comme ils ne disaient rien, ils ont cassé le mobilier et ont volé de l'argent".

Juan Orellana intègre le Mouvement de Paysans de Santiago del Estero (MOCASE). Lundi 22 septembre, la police est entrée dans sa maison de la commune de La Providencia dans le département de Copo, accompagnée par le juge de la Crimen de Monte Quemado, Anselmo Juarez, ex-avocat du staff de police de Musa Azar. Juarez recherchait Orellana ainsi que d'autres "éléments du mocase". Comme Orellana n'était pas chez lui, la police s'en est prit à ses enfants, dont l'un souffre de retard mental. Comme à l'époque du juarisme (1), ils ont emporté 22 mille pesos (7000 euros) d'épargne,  provenant de ventes de charbon, de bétail, du produit d'une tombola au bénéfice de l'organisation et de l'épargne des paysans. Ils ont aussi emporté trois tronconeuses, une vieille camionnette Ford 65, un fusil de chasse, des vêtements et des documents. (...)

"C'est la première fois que je vois un tel désastre", dit un Orellana désespéré à Página/12. "Cela fait longtemps que je vis ici, mon fils a déjà trente ans ; les grands entrepreneurs veulent toujours nous virer d'ici, c'est pour cela que nous sommes en lutte et je pense que c'est pour cela qu'ils veulent nous liquider, mais nous n'allons pas cesser."
 
Poco se trouve à environ à 200 kilomètres de Quimili, où fonctionne siège le du MOCASE. Le même jour, Orellana Ce même jour, Orellana a pris le premier bus qu'il a trouvé là pour rechercher  secours là-bas. L'organisation essaie de dénoncer depuis plus d'une semaine les caractéristiques de cette incursion judiciaire et de celles qui ont eu lieu tout le mois de septembre avec des perquisitions et de violentes arrestations. Seulement pour le Mocase Via Campesina (M-VC) avec siège à Quimili, la Justice a arrêté 50 personnes. Jusqu'au week-end dernier, il y avait encore 21 personnes détenues. Après les  dénonciations publiques à l'intérieur et à l'extérieur du pays, la Justice a fini par en libérer 19. Selon l'Assemblée Permanente pour les Droits de l'Homme (APDH), il y a eu aussi des arrestations de paysans d'autres organisations comme l'Incupo,  l'Union de Producteurs de Salado Nord (Usan) et la Mesa de Tierras. Et en ce moment, plus de 150 paysans du Mocase VC ont des mandats d'arrêt. En raison de cette situation, le Mocase s'est rendu d'urgence hier dans la capitale de la province. Hier soir sont arrivés environ 30 paysans, aujourd'hui 300 autres les rejoindront.

"Évidemment à partir d'août, il y a eu un durcissement envers les paysans", dit Antenor Ferreira, avocat de l'APDH. Les opérations policières qui en général ne sont pas réalisées par plus de quatre ou cinq personnes, le sont avec "des procédés brutaux avec non moins de 30 effectifs, avec un déploiement d'infanterie qui rapidemment apparaissent avec des grenades et des gilets au milieu de la montagne".

En guise d'exemple, entre le 5 et le 19 septembre, le Mocase a relevé trois procédés. Le vendredi 5, une commission policière a exigé à un groupe de paysans de Quimili les droits de possession des terres, un procédé avec lequel les nouveaux entrepreneurs de la zone essaient de faire en sorte que les habitants vendent et abandonnent les champs. Comme les paysans n'ont rien voulu signer, la police a arrêté cinq d'entre eux et les en a ensuite envoyés deux dans la prison de Santiago où ils sont encore détenus : ce sont Santos Ramon Gonzalez et Luis Domingo Gonzalez, les deux prisonniers sans résolution judiciaire. Le samedi 6, il y a eu une perquisition dans cinq demeures de la localité de Pinto avec 33 policiers qui sont entrés pour un supposé vol supposé d'un cheval. Le Mocase a expliqué qu'un jour, après une opération policière, le sénateur santiagueño Emilio Rached, le même qui a voté du côté du soja au Congrès, allait être accueilli chaleureusement par un groupe d'entrepreneurs. Et ils croient qu'il s'est agi d'une manière de leur faire peur. Le vendredi 19 la police a arrêté Sabino Chavez dont les entrepreneurs prétendent le champ.

Pourquoi cette nouvelle vague s'est-elle déclenchée ? La première donnée importante que mentionnent quelques sources locales ce sont les élections. Santiago est en processus électoral. Et le 30 novembre prochain, le radical qui soutient Kirchner, Gerardo Zamora cherchera renouveler son mandat comme gouverneur pour quatre autres années. Cette donnée est valable mais elle n'explique pas les vraies raisons de fond.

Depuis l'intervention fédérale, les massives politiques d'extermination des paysans  ont reculé. Les escadrons paramilitaires à la solde des propriétaires fonciers n'ont pas disparu mais leur pouvoir avait reculé. L'intervention et Zamora ont aussi changé l'article 182 bis du Code de Procédur Pénal qui permettait à la Justice pénale d'agir librement pour expulser les paysans de leurs terres sans jugement préalable avec une seule plainte. Une instance de dialogue et un espace de crise ont été ouverts mais cela n'est pas suffisant.

"Nous voyons d'un bon oeil que le gouvernement provincial de Zamora participe au  dialogue avec la commissions de terres, le comité de crise et qu'il essaie de s'occuper de ces problèmes - dit Ferreira-, mais nous ne voyons pas la même attitude au niveau de la Justice, dans le Pouvoir Judiciaire et dans le Ministère de Gouvernement à partir duquel agit la police.

1- Santiago del Estero est une province du nord-ouest de l'Argentine qui a été gouvernée pendant 50 ans (en dictature comme en démocratie) d'une main de fer par l'autoritaire Carlos Juarez. En 2003, l'Etat a "intervenu" la province, Juarez a été arrêté et des élections ont vu la victoire du radical Zamora. Le Mocase existe depuis 1990 et regroupe 16 000 familles qui luttent pour la terre et l'amélioration de leurs conditions de vie. (NdT) 

Alejandra Dandan, Pagina/12, 30 septembre 2008.

http://www.pagina12.com.ar/diario/elpais/1-112478-2008-09-30.html

Traduit par http://amerikenlutte.free.fr

 
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