Equateur: Correa veut la dissolution du Congrès
26-06-2007

Le président équatorien Rafaël Correa a surpris hier en affirmant que l'Assemblée Constituante devrait dissoudre le Congrès le jour de son ouverture. Le mandataire avait réitéré à plusieurs occasions que l'avenir de toutes les institutions publiques du pays restait aux mains de l'Assemblée. Cependant, il avait toujours soutenu que le Législatif continuerait de fonctionner tandis que la Constituante discutait une nouvelle Carta Magna. "Mais avec cette classe de Congrès ne peut pas fonctionner une démocratie. Qui représentent-ils?", a questionné Correa durant son programme hebdomadaire de radio.

Le président équatorien n'a pas lésiné en  accusations. "Face à cette classe de Congrès et avec l'achat de députés je crois qu'il faudra le dissoudre", a soutenu Correa. "C'est une honte", a-t-il ajouté. Les mots du mandataire démontrent que Alianza Pais, la coalition qu'il a composée en janvier dernier, est convaincue qu'elle sera la majorité dans l'Assemblée Constituante. Le 30 septembre prochain, les équatoriens devront choisir 130 congressistes, qui auront les pleins pouvoirs pour réformer tout le système politique et économique du pays. L'écrasant résultat de la consultation populaire d'avril dernier pour installer l'assemblée a rendu compte du fort soutien que maintient le gouvernement,  malgré les avatares des premiers mois.

La lutte du mandataire équatorien avec le Congrès national est de longue date. Durant la campagne électorale, Correa a décidé de ne pas présenter de candidats pour le Législatif parce qu'il ne croyait pas en cette institution comme elle était composée. C'est pour cela qu'il a centré une grande partie de sa campagne à l'attaquer comme symbole de la vieille politique et refuge des dirigeants traditionnels. Le message a été un succès et le jeune économiste a gagné les élections. Cependant, après avoir assumé le gouvernement, il a commencé à se rendre compte de la difficulté de générer des changements avec le pouvoir législatif, totalement d'opposition. Il s'est donc lancé dans un affrontement institutionnel qui est arrivé à avoir des pics d'extrême tension.

La stratégie a été un succès et après plusieurs allers-retours juridiques, plus de la moitié des députés a été expulsée par la Justice. Des suppléants ont assumé à leurs places. Au début, ils ne répondaient pas aux partis auxquels ils appartenaient, lesquels ne les avaient pas autorisé à prendre possession des sièges. Durant des mois, ces nouveaux députés se sont alliés dans des sujets clefs comme la minorité de gauche et ont permis la réactivation du Congrès, déjà plus proche du gouvernement de Correa. Le moment le plus important a été quand le nouveau Congrès a approuvé la consultation populaire qui, plus tard, a à son tour approuvé par plus de 80 pour cent la convocation à une Assemblée Constituante.

Mais cette nouvelle base légitime a semblé disparaître cette semaine quand les députés ont mis leur veto à  un projet de l'Exécutif qui était qualifié d'urgent. Il s'agissait de rien de moins que de la Loi de Souveraineté Énergétique et des Hydrocarbures. Avec ce projet le gouvernement cherchait à mettre un frein à la contrebande de combustibles et à la spéculation, deux problèmes qui engendrent de grands malaises dans la société équatorienne. Selon le texte que l'Exécutif a envoyé, les entreprises qui commercialisaient illicitement les combustibles -essence, diésel, gaz liquide- pourraient payer des amendes allant jusqu'à 510 mille dollars. L'opposition, avec les suppléants, a serré les rangs et a qualifié la proposition d'inconstitutionnelle. Pour Correa, le message a été clair. Les partis traditionnels récupéraient le contrôle de leur dernier bastion.

Pagina/12, 24 juin 2007. Traduction: http://amerikenlutte.free.fr