Argentine : Les crimes de la Triple A considérés crimes de lèse humanité
21-03-2008
La Chambre Fédérale de la ville de Buenos Aires a ratifié le 17 mars que les crimes du groupe d’extrême droite Triple A (Alliance Anticommuniste Argentine, en action de 1973 jusqu'au coup d'Etat de 1976) doivent être jugés en tant que délits de lèse humanité imprescriptibles car ils ont été commis face à un État qui « soit par tolérance, soit par impuissance, était absent ».
Les « très graves délits commis ne trouvaient pas de limite ni de réponse dans les ressorts constitutionnels de l’État qui, soit par tolérance, soit par impuissance, était absent », a souligné l’un des juges Horacio Cattani, d’après la résolution de 132 folios.

La décision de la Chambre a été prise dans le cas précis du sous-officier de la Police Fédérale Miguel Angel Rovira, dont la détention provisoire a été confirmée, mais cette décision a compliqué la situation de l’ancienne présidente Maria Estela Martinez de Perón et des autres accusés dans l’affaire judiciaire car elle crée un précédent. L’arrêt a ratifié la réouverture de l’enquête entreprise par le juge fédéral Norberto Oyerbide, qui a mis en examen avec détention provisoire l’ancienne mandataire et d’anciens lieutenants du décédé José Lopez Réga, - identifié comme chef de la Triple A -, parmi eux Rodolfo Almiron, qui sera extradé d’Espagne. Une demande d’extradition pèse sur l’ancienne présidente qui est toujours en cours de résolution dans le pays ibérique.
Les juges Cattani et Eduardo Freiler ont coïncidé au moment de déclarer que les délits du groupe d’extrême droite constituent des crimes lèse humanité, alors que leur collègue Eduardo Farah a voté pour la prescription de l’affaire, considérant qu’il s’agissait de crimes ordinaires commis sans la protection de l’appareil d’état. Le groupe d’extrême droite créé par le ministre de Bien-être Social décédé, José Lopez Rega « a menacé, porté atteinte et tué un nombre encore non déterminé de personnes » dans un contexte où « par impuissance, par crainte ou pour toute autre raison, le Pouvoir Judiciaire refusait d’enquêter », a soutenu Cattani.
De même, « au Congrès National, on empêchait que le sujet soit abordé » et « d’autres ministres du Pouvoir Exécutif savaient et taisaient, ou dans le meilleur des cas informaient les futurs victimes que leur vie était en danger », a ajouté le juge. « Dans le gouvernement et particulièrement dans le Ministère de Bien-être Social, l’appartenance de José Lopez Rega a la Triple A était connue de tous », a souligné Cattani, qui est membre de la salle II de la cour d’appel mais qui a été convoqué à voter pour trancher le désaccord des deux membres de la Salle I qui devaient décider, Freiler et Farah.
Pour Cattani « il est clair aujourd’hui qu’il ne s’agissait pas ici de l’action d’un simple ministre qui a entrepris en solitaire une série d’actions délictuelles, mais d’un ministre se trouvant dans une situation visiblement privilégiée et qui détenait un tel pouvoir qui était capable de lui garantir, lui et son organisation, une impunité totale face à la gravité des délits qu’ils commettaient. »
Lopez Rega « a monté une organisation délictuelle » et « a y entraîné des fonctionnaires publics de divers domaines », en plus d’avoir eu recours à des « détournements de fonds de l’État National pour financer sa logistique et même ses besoins en matière d’armes ». « Toutes les preuves réunies font allusion au fait que la Triple A a été structurée au sein du Ministère de Bien-être Social et que le groupe d’origine était constitué par les gardiens de l’ancien ministre Lopez Rega », a considéré à son tour Freiler dans l’arrêt auquel Télam a eu accès.  Ce juge a considéré que la Triple A a commis des « délits de lèse humanité, sans importance de la toile de fond d’un Gouvernement plongé dans une crise, dans la rationalité formelle caractéristique d’un État bureaucratique comme type idéal, manifestée dans l’affaiblissement de ses capacités pour mener à bout leurs fonctions et dans la projection de collapsus. »
Ces « traits institutionnels réduits à un rôle purement ornementaux ont définitivement été abandonnés avec le coup d’état militaire de mars 1976, qui a révélé la continuité de la Triple A à travers sa participation transcendante dans le centre clandestin de détention connu comme Automotores Orletti. » a-t-il ajouté.  En déclarant les assassinats commis par la Triple A crimes de lèse humanité, la cour d’appel a confirmé la détention provisoire de Rovira en tant que membre d’une association illicite et auteur, à huit reprises, d’homicides doublement qualifiés. Les victimes furent Rodolfo Ortega Peña, Alfredo Curutchet, Julio Troxler, Silvio Frondizi, Luis Mendiburu, Carlos Laham, Pedro Barraza et Pablo Laguzzi.
Casapueblos - AEDD (Association d’Anciens Détenus Disparus), 18 mars 2008-03-21
http://casapueblos.blogspot.com/
Traduit par eli
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